Luc MICHEL pour EODE Press Office /
avec AFP – Nouvelles de Mauritanie / 2013 12 24 /
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Elections législatives et municipales en Mauritanie ce 21 décembre 2013 : une majorité absolue de députés pour le parti présidentiel. Aux municipales, le parti présidentiel a également remporté la victoire dans 154 communes sur les 218 que compte le pays …
Le taux de participation, qui était de plus de 75% au premier tour du 2 novembre, était de "plus de 72%" au second, selon la Commission électorale. Moins d'un million d'électeurs étaient appelés à voter au second tour, contre 1,2 million au premier, pour renouveler 30 des 147 sièges que compte l'Assemblée nationale et les conseils municipaux de 119 communes sur les 218 du pays.
UN REGIME INSTABLE ISSU D’UN COUP D’ETAT
Ce sont les premières élections législatives et municipales organisées en Mauritanie depuis 2006. Le processus électoral avait été bloqué après un coup d'Etat en août 2008. L'actuel président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz, ancien général dans l'armée, avait alors pris le pouvoir en renversant Cheikh Sidi Ould Abdallahi, premier chef d'Etat démocratiquement élu de Mauritanie (*).
Un accord conclu à Dakar en 2009 avait permis l'organisation d'une élection présidentielle, remportée en juillet de la même année par le président Aziz dans des conditions critiquées par l'opposition.
« La pression des partenaires au développement de la Mauritanie, notamment de l’Union européenne a joué grandement dans le « dénouement » des aspects de la crise liés aux élections », précise un observateur. Certains médias locaux ont même parlé, bien légèrement, « de milliards d’euros qui attendent l’organisation des élections pour venir renflouer les caisses de l’Etat » (sic) …
LES RESULTATS DES LEGISLATIVES :
VICTOIRE PRESIDENTIELLE ET PERCEE DES ISLAMISTES
Le parti présidentiel UPR a obtenu la majorité absolue des sièges à l'Assemblée nationale en Mauritanie, selon les résultats officiels des élections législatives annoncés ce dimanche, qui le placent également en tête des élections municipales.
* L'Union pour la République (UPR, au pouvoir) a obtenu 74 sièges sur les 147 de l'Assemblée nationale et, avec ses alliés d'une douzaine de petits partis, rafle un total de 108 sièges de députés.
* L'opposition obtient 37 sièges, dont 16 pour les islamistes du parti Tewassoul.
* Tewassoul devient le deuxième parti du pays et la première force d’opposition à l'Assemblée nationale.
* El-Wiam, un parti dirigé par d'ex-hauts responsables du régime de Maaouiya Ould Taya (1984-2005), obtient 10 députés, contre sept pour l'Alliance populaire progressiste (APP) du président de l'Assemblée nationale sortante, Messaoud Ould Boulkheir.
* L'Alliance pour la justice et la démocratie/mouvement pour le Renouveau (AJD/MR) dirigée par un journaliste, Ibrahima Sarr, candidat malheureux à la présidentielle de 2009, obtient deux députés.
Deux sièges de députés seront pourvus ultérieurement, lors de législatives partielles à une date non déterminée pour l'instant.
LES MUNICIPALES CONFIRMENT LES RESULTATS DES LEGISLATIVES ET LA PERCEE DES ISLAMISTES
Aux municipales, le parti présidentiel a remporté la victoire dans 154 communes sur les 218 que compte la Mauritanie, selon les résultats proclamés par le président de la Commission électorale, Abdellahi Ould Soued Ahmed.
Les islamistes de Tewassoul obtiennent un total de 18 communes.
Il est l'unique formation des 11 partis d'opposition de la ‘Coordination de l'opposition démocratique’ (COD) à avoir participé aux scrutins, boycottés par les autres membres de cette coalition. La COD a boycotté ces élections pour dénoncer leur organisation "unilatérale" par le parti du président Aziz.
« Le spectre du boycott de ces élections par la totalité de la Coordination de l’opposition démocratique (COD) a finalement été évité. Certes le parti islamiste « Tawassoul » est le seul à avoir décidé de participer mais c’est une formation qui compte. D’aucuns considèrent même que c’est le seul parti des dix qui composent la COD à disposer de chances réelles pour venir bousculer les certitudes du parti au pouvoir et de ses alliés au sein de la majorité présidentielle », analysait un observateur.
UNE CRISE POLITIQUE QUI PERDURERA …
Ces élections "n'apporteront aucune solution à la crise" politique en Mauritanie, à cause des "énormes irrégularités qui les ont marqués" et du boycott d'une partie de l'opposition, a déclaré dimanche à la presse le président de Tewassoul, Jemil Ould Mansour. Fort de ses résultats, le président du parti islamiste a appelé dimanche à un "dialogue urgent" pour résoudre la crise politique. "J'en appelle à un dialogue urgent pour résoudre cette crise qui dure depuis le coup d'Etat de 2008", a déclaré à la presse Jemil Ould Mansour.
Le climat politique mauritanien est effectivement très mauvais. « Les partis d’opposition étaient ensemble contre le pouvoir du président Aziz mais se regardaient eux-mêmes en chiens de faïence. Chaque parti manoeuvrait pour que son chef écarte de la voie vers la présidence ses « alliés » de circonstance et œuvre pour être président à la place du président. Les islamistes n’ont-ils pas avoué qu’au moment où la COD, dont ils sont membres, s’acheminait inéluctablement vers le boycott eux préparaient, dans le secret le plus total, les élections ? », conclut un observateur mauritanien.
Luc MICHEL
Pour EODE Press Office
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(*) La Mauritanie a obtenu son indépendance de la France le 28 novembre 1960. Le pays fut gouverné jusqu'en 1978 par Moktar Ould Daddah, qui avait instauré un régime civil de parti unique. Originaire de Boutilimit, Daddah avait une vision idéologique de la Mauritanie – liée aux nationalismes révolutionnaires arabes, le Ba’ath, notamment a eu une influence en Mauritanie -, vision qui lui valait la réputation d'avoir un nationalisme et une volonté de faire sortir le pays du désert et de la misère. Le régime restera très apprécié et regretté par l'ensemble de la population mauritanienne.
Le président Ould Daddah est renversé, en 1978, par une junte militaire que dirige le colonel Ould Walata, lui-même renversé en 1980 par le colonel Ould Haidalla et ce dernier, renversé par Ould Taya en décembre 1984. Le président Maaouiya Ould Taya a fait l'objet de trois coups d'État (8 juin 2003, 9 août 2004 et 3 août 2005). Les deux premiers ont échoué ; Le troisième, mené par le Colonel Ely Ould Mohamed Vall, directeur de la sûreté nationale, et le colonel Ould Abdel Aziz, chef de la garde présidentielle, a remis au pouvoir une junte appelée ‘Conseil militaire pour la justice et la démocratie’, qui s'est engagée « à créer les conditions favorables d'un jeu démocratique ouvert et transparent sur lequel la société civile et les acteurs politiques auront à se prononcer librement ».
Ceci jusqu’au coup d’état de 2008, d’où est issue la configuration politique actuelle …